EMILY
Eléphant
Femelle
1993
Kenya
Tsavo est
L'histoire d'Emily
Emily était la matriarche des tout premiers éléphanteaux du programme de parrainage de Terre et Faune : Nyiro, Icholta, Natumi et Salama. Elle s'en occupait comme de ses propres enfants. On souhaite lui rendre hommage ici en racontant l'histoire de son sauvetage, un exemple parmi tant d'autres sauvetages réalisés par les Sheldrick pour venir en aide à leurs amis éléphants. A l'heure actuelle, ils ont réintroduit 322 orphelins avec succès.
Emily est née dans le parc national de Tsavo Est en septembre 1993. Elle n’avait qu’un mois lorsque sa famille traversait de Tsavo Ouest vers Tsavo Est, en passant par le camp de prisonniers de Manyani. C’est alors que ce minuscule éléphanteau est tombé dans une ancienne latrine désaffectée. Le troupeau, impuissant, désemparé et traumatisé, s’est agité, attirant l’attention des rangers du poste d’entrée de Manyani, tout proche du parc.
Lorsque les rangers sont arrivés, le troupeau s’est éloigné de quelques mètres, ce qui a permis aux rangers d'extraire le bébé éléphant du trou. Mais elle en est ressortie couverte d’excréments humains puants. Une tentative de la réunir avec sa mère a échoué : l’odeur humaine imprégnée sur la petite était si forte que sa mère ne l’a pas reconnue et l’a violemment rejetée avant de s’enfuir, terrorisée.
Emily a mis quatre mois à se remettre, tant physiquement que psychologiquement, de cette terrible épreuve qui incluait le rejet de sa propre famille — un coup dévastateur pour une petite éléphante ayant jusqu’alors grandi dans la tendresse, les soins et l’amour de son clan. Pendant cette période, elle a été confrontée à une grande détresse émotionnelle ainsi qu'à de nombreux troubles physiques. Parmi eux : des troubles digestifs et un ralentissement du transit intestinal provoquant une occlusion et de violentes douleurs abdominales. Son état était si grave qu’il a fallu la sédater afin de lui administrer des litres de paraffine liquide par sonde gastrique. Nous avons cru la perdre à ce moment-là, mais elle a réussi à surmonter cette crise et a finalement guéri complètement.
Pendant ses deux années passées au refuge de Nairobi, elle a toujours été très attentionnée envers les bébés plus jeunes et plus petits, particulièrement attachée à « Imenti », arrivé le jour même de sa naissance. Aitong, l’éléphante qui est devenue une nounou aussi attentionnée que compétente pour Emily, était une autre favorite du refuge. Elle avait subi un traumatisme crânien l’empêchant de marcher droit pendant plusieurs semaines. Aitong ne pouvait tourner qu’en rond. En tenant la queue d’Emily ou d’Imenti qui cherchaient à l'aider, elle a fini par réussir à marcher en ligne droite, et s’est elle aussi totalement rétablie. Une solidarité exemplaire bien connue chez les éléphants.
Une fois passée la période critique au refuge de Nairobi, Emily a rejoint les autres orphelins plus âgés dans le parc national de Tsavo Est, dans le cadre de leur réintégration progressive dans la vie sauvage. À cette époque, la célèbre éléphante « Eleanor » était la matriarche du groupe, composé des anciens jeunes mâles du refuge (Olmeg, Taru, Dika, Ndume, Edo et Ajok), ainsi que de trois autres éléphanteaux orphelins suffisamment âgés pour être confiés directement à elle : Lissa, Chuma et Mpenzi.
Eleanor nous a quittés pour rejoindre les éléphants sauvages de Tsavo lorsqu’elle est tombée enceinte pour la première fois, au début de la quarantaine. Les trois orphelins qui dépendaient plus d’elle que des gardiens humains — Lissa, Chuma et Mpenzi — sont partis avec elle et ont été confiés à sa meilleure amie sauvage, une matriarche nommée « Catherine ».
Après le départ d’Eleanor, Emily est devenue la femelle la plus âgée du groupe encore dépendant des humains. Au fil du temps, les jeunes mâles plus âgés qu’elle se sont détachés pour rejoindre des compagnons mâles sauvages, comme le font les jeunes éléphants à l’adolescence. Emily est alors devenue la chef incontestée, ou Matriarche, de l’unité de Voi, avec Aitong comme bras droit et nounou — rôles qu’elles remplissent encore aujourd’hui, lorsqu’elles retrouvent les autres orphelins encore dépendants.
Emily et Aitong, devenues à leur tour mères dans la savane, viennent souvent affublées de leurs bébés aux enclos de Voi. Elles aiment rendre visite aux éléphanteaux encore dépendants et à leurs anciens gardiens. Elles sont toujours accueillies avec une immense joie et affection par leur famille éléphantesque élargie, conscientes que la « famille » humaine qui leur a sauvé la vie — et celle de tant d’autres éléphanteaux brisés, malades ou blessés — est faite de bons samaritains aimants et toujours là pour elles. Nous pensons que ces liens dureront toute la vie, car les éléphants n’oublient jamais, et les attaches familiales et amicales sont extrêmement fortes.